Les Amis de La Vie proposent : « La part des femmes dans la Bible » avec Sylvaine Landrivon le 6 juin 2024 à l’Espace Ste-Anne, à 20h15

Nicodème Voir la version PDF

Nicodème dans l’évangile de Jean (3, 1-21 ; 7, 50 et 19, 39)
Lundi 18 avril 2022 — Dernier ajout dimanche 27 août 2023
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Une ancienne légende juive raconte que l’enfant dans le ventre de sa mère est dans l’intimité de Dieu. Mais à la naissance, un ange vient poser son doigt sur sa lèvre supérieure en disant : « chut ! » et le nouveau-né oublie tout ! Il bascule aussitôt dans l’opacité du monde en poussant son premier cri. Alors, pour éclairer leur chemin sur la terre, Dieu a donné la Torah aux hommes.

Ce soir-là,le vieil homme Nicodème s’apprête à étudier la Torah toute la nuit car c’est la fête de Pâques à Jérusalem. La tradition veut que pendant cette nuit-là, l’esprit reste éveillé à la recherche de Dieu. Mais assis devant le rouleau ouvert, il se souvient de la légende et soupire. Le doigt posé sur la marque de l’ange, il songe que parfois la Torah reste bien obscure même pour un savant comme lui qui connaît les Écritures sur le bout des doigts.

Car Nicodème est un maître en Israël. C’est un homme respecté qui siège parmi les notables au Sanhédrin. Il est pharisien et fait autorité parmi eux. Il est de ceux qui pensent que l’offrande qui plaît à Dieu est celle d’une vie juste. Pour cela, il suit scrupuleusement les commandements. Nicodème est un homme bon, il a le souci des autres. Il est de bon conseil.

Mais ce soir, Nicodème a la tête ailleurs, il pense à ce jeune rabbi dont tout le monde parle. Un certain Jésus qui vient d’un village du nord en Galilée, une terre de paysans et de pêcheurs. Il est arrivé à Jérusalem depuis peu, il enseigne et guérit. On ne lui connaît aucun maître.

Nicodème ne l’a rencontré qu’une seule fois et c’était il y a longtemps au Temple. Jésus avait 12 ans, il connaissait déjà bien la Torah, c’était surprenant à cet âge.

Maintenant qu’il enseigne, sa renommée a fait le tour de Jérusalem et Nicodème a l’intuition que ce rabbi n’est pas comme les autres. Récemment, il s’est passé un événement curieux.Jésus a été pris d’un accès de colère au Temple, il s’en est pris aux marchands, il les a chassé avec un fouet. À ceux qui le questionnaient, il a répondu « Détruisez ce temple et en 3 jours je le relèverai ! » Beaucoup s’interrogent : « Qui est cet homme ? » Il est temps de le rencontrer.

Jean 3, 1-21

Nicodème prend sa lampe, attrape son manteau et s’en va de nuit par les rues désertes de Jérusalem. Les gens sont rentrés chez eux. On entend des bribes de voix, des cris d’enfants. Nicodème marche rapidement, il ne tient pas à être reconnu.

Quand il arrive, il entend à travers la porte des rires. Jésus et ses disciples discutent entre eux. Il frappe. Un jeune homme lui ouvre. L’air surpris, il s’efface respectueusement devant le vieil homme et le fait entrer. Ils sont tous assis à même le sol sur une natte. Un homme se lève en souriant. « Bienvenue à toi, Nicodème. J’ai beaucoup entendu parler de toi ; allons sur la terrasse, nous serons plus à l’aise pour discuter. »

Nicodème le suit dans le petit escalier étroit qui mène sur le toit. Il s’assoit sur les coussins, il observe Jésus. Ce jeune rabbi n’a pas les manières d’un paysan, ni celles d’un habitant de Jérusalem, d’ailleurs et si ce n’était son accent du nord on ne saurait pas d’où il vient. Sa personne dégage une assurance naturelle.
- « Rabbi, dit Nicodème, nous savons que tu es un maître qui vient de la part de Dieu car personne ne peut opérer les signes que tu fais si Dieu n’est pas avec lui. »

Le ciel est brillant d’étoiles ce soir on voit jusqu’aux confins de l’univers, c’est une belle soirée pour parler de Dieu. Ils se mettent à parler de la Torah, Nicodème s’émerveille des réponses de Jésus comme autrefois au Temple. Cela fait bien longtemps qu’il n’a pas eu un échange aussi passionnant avec un maître comme lui ! Jésus a une intelligence si profonde des Écritures.

Mais quand ils commencent à parler du Royaume à venir, Jésus se tait et le regarde. Il lui dit : « En vérité, je te le dis à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu. » Nicodème fronce les sourcils, il est perplexe. Un nouveau-né serait-il plus à même de voir le Royaume qu’un vieillard qui a étudié la Torah toute sa vie ! Bien sûr il y a la légende juive de l’ange. Mais c’est une légende. Tout recommencer, profiter d’une seconde chance ? Sa mère n’est-elle pas juive ? Est-ce que cela a du sens. Il ne comprend pas et il se sent vieux tout à coup :

  • « Comment un homme pourrait-il naître s’il est vieux ? Pourrait-il entrer une seconde fois dans le sein de sa mère et naître ? »
    Jésus sourit : « Tu as raison : ce qui est né de la chair est chair mais ce qui naît de l’Esprit est esprit. En vérité, je te le dis : nul s’il ne naît d’eau et d’Esprit ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. »

Nicodème redresse la tête : naître de l’Esprit, naître du souffle créateur qui planait sur les eaux à l’origine. Il est la source de toute vie. Sans lui rien n’existerait ; sans lui, ils ne seraient même pas là cette nuit pour en discuter. Nicodème sent le souffle du vent sur sa peau. Ce vent qui vient des collines et qui emporte leurs paroles au loin.

Jésus poursuit : « Le vent souffle où il veut et tu entends sa voix mais tu ne sais pas d’où il vient et tu ne sais pas où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit. Le souffle du vent est insaisissable, aussi insaisissable que les paroles de Jésus « il vous faut naître d’en haut ».
- « Comment cela peut-il se faire ? » demande Nicodème
- « Tu es maître en Israël et tu n’as pas la connaissance de ces choses ! Et pourtant c’est la vérité. Le fils de l’homme est descendu du ciel pour témoigner que Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne soit pas perdu mais qu’il ait la vie éternelle. Quiconque croit au Fils renaît pour la vie éternelle. C’est pourquoi je t’ai dit il vous faut renaître d’en haut. »

Jésus prend le temps d’expliquer et Nicodème écoute. Tout son savoir ne lui semble d’aucun secours à cet instant pour comprendre car c’est avec le cœur qu’il faut recevoir ces paroles. Il lui faut s’abandonner, faire confiance comme un petit enfant sur le sein de sa mère.

C’est presque le matin quand ils se quittent. De retour chez lui, le vieil homme se sent léger et heureux mais il s’interroge : « Comment peut-on renaître d’en haut ? »

Jean 7, 50

Le temps a passé. Nicodème n’a pas eu l’occasion de revoir Jésus mais il l’a suivi de loin. Bientôt les faits et gestes du rabbi galiléen sont au centre de toutes les conversations. Ses frères pharisiens sont divisés à son sujet. Un jour, Nicodème se fait rabrouer violemment alors qu’il tentait de prendre la défense de Jésus : « Peut-on condamner un homme sans l’avoir entendu ? » On le menace : « Es-tu galiléen toi aussi ? ». Les choses sont allées de mal en pis. Certains pharisiens, scribes et grands-prêtres ont fini par se liguer contre Jésus et ils l’ont arrêté en cette terrible de nuit avant la fête de la Pâque.

Ils l’ont fait comparaître devant le Sanhédrin. Nicodème a assisté impuissant à cette mascarade de procès ! Il s’est dit qu’ils allaient le lapider mais ils ont fait pire ils l’ont livré à l’ennemi, lui un rabbi ! Un homme de Dieu ! Les romains l’ont condamné comme un malfaiteur. Et Jésus, si habile à parler, n’a rien dit. Il s’est laissé faire comme l’agneau que l’on conduit au sacrifice. Jean 19,39

Nicodème l’a suivi de loin jusqu’au calvaire. Il était midi quand Jésus est mort sur la croix, abandonné de tous. Un soldat lui a transpercé le côté, de l’eau et du sang en ont jailli. C’est fini !

C’est alors que Nicodème sent la main de Joseph d’Arimathie se poser sur son épaule : « Viens ! J’ai obtenu de Pilate l’autorisation de prendre son corps. Nous allons l’ensevelir dans un tombeau tout proche car le Shabbat va bientôt commencer. » Nicodème se retourne : « Allons ! Donnons-lui une sépulture de roi ! » Et au vu de tous, Joseph et Nicodème descendent Jésus de la croix. Ils le transportent jusqu’au tombeau. Nicodème prend de l’eau et lave toutes les souillures puis, à pleines mains, il applique sur le corps du supplicié, le mélange de myrrhe et d’aloès qu’il a apporté ; Cette proximité physique avec Jésus le bouleverse. Enfin, les deux hommes entourent le corps de bandelettes puis ils sortent tandis que les soldats roulent la lourde pierre devant l’entrée.

Jésus disparaît dans l’obscurité du tombeau et Nicodème plonge dans l’opacité du monde. Il oublie tout. Le shabbat qui commence ce soir-là a un goût de cendre et de sang et la lumière de la Torah est bien fragile à cet instant.

Mais au matin, un cri retentit : « Il est vivant ! » Aussitôt Nicodème sent au fond de lui, un déchirement comme une nouvelle naissance. Oui ! Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, Jésus le rabbi de Galilée ; maintenant Nicodème voit le Royaume de Dieu, maintenant Nicodème renaît d’en haut !

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