Chers frères et sœurs dans le Christ, chers amis,
« Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ! »
La bonne nouvelle de Noël est toute entière dans cette annonce des anges ! La petite conjonction ET nous fait entrevoir ce que l’Église approfondira au fil de sa Tradition : la gloire de Dieu c’est la paix donnée à tous les hommes par ce petit enfant qui vient de naître à Bethléem. Dans le langage biblique la paix ce n’est pas que la quiétude ou l’absence de conflit ; la paix c’est l’accomplissement.
La gloire de Dieu c’est donc l’accomplissement des hommes dans le Christ. Saint Irénée dira aussi : « La gloire de Dieu c’est l’homme debout ».
Tout à l’heure nous chanterons « Notre Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit Dieu ». Nous devons aussi ces paroles à Irénée de Lyon. Le sens de notre fête de Noël est donc bien de célébrer l’Incarnation, la venue de Dieu parmi nous pour nous emporter dans la dynamique de son amour. Notre joie de Noël est une joie qui ne nous fait pas que spectateurs attendris, mais distants, d’un événement du passé, cette joie nous provoque aujourd’hui au plus profond de nous-mêmes à nous en rendre partie prenante.
Puisque Dieu se fait homme, en son Fils Jésus ; puisqu’il endosse notre condition humaine, puisqu’il va vivre pour nous, mourir et ressusciter pour nous, il prend le risque inouï de vouloir se livrer aux mains de l’homme et il nous propose, par toute notre vie, de contribuer, nous aussi, à le révéler.
Pour entrer dans cette proposition, avec l’aide du récit que nous venons d’entendre, tentons de nous faire proches tour à tour des bergers et de Marie et de Joseph pour identifier les attitudes qui nous conduisent sur le chemin la révélation : l’accueil de la fragilité et l’acceptation de la surprise.
Accueil de la fragilité
Les représentations de la Nativité dans l’art et dans les crèches de nos maisons et de nos églises, pour touchantes qu’elles soient, passent sous silence, sans doute par discrétion, le moment exceptionnel de la naissance.
J’ai eu personnellement la joie immense de voir naître mes 5 fils. Ce furent des moments de grande intimité, de grande fragilité et de grande joie.
Pour tenter de rentrer encore plus dans ce mystère de Noël, imaginons la situation de ce jeune couple jeté sur les routes, qui doit requérir l’aide des sage-femmes locales. Pensons aux douleurs de Marie, à sa joie de recevoir son bébé dans ses bras. Pensons aux gestes de ces nouveaux parents pour nettoyer Jésus nouveau-né, pour l’habiller, le déposer aussi confortablement que possible. Imaginons aussi ce petit bonhomme chercher le sein de sa mère pour se nourrir de son lait pour la première fois.
En se faisant homme, Dieu en Jésus, accepte de suivre ce chemin très ordinaire, commun à tous les hommes et toutes les femmes du monde. Il accepte de se rentre entièrement dépendant des soins de ses parents.
Par extension, nous pouvons dire aussi que notre Dieu accepte de se rendre dépendant des soins de notre humanité. Par cette naissance qui ressemble à bien des naissances dans des conditions difficiles notre Dieu nous invite le reconnaître présent dans tout ce qui est petit, dans tout ce qui a besoin de nos soins, il nous invite à accueillir sa fragilité comme le firent Marie et Joseph.
Acceptation de la surprise
Nous sommes tellement habitués à la présence des bergers dans nos crèches que nous perdons de vue l’étrangeté de l’annonce qui leur est faite en priorité : les bergers dans la tradition de l’époque n’étaient pas bien considérés, le talmud pensait même qu’ils avaient du mal à faire pénitence.
Contre toute attente, l’ange du Seigneur vient donc s’adresser à eux et il reprend précisément les gestes simples de Marie pour leur donner les indices auxquels ils vont reconnaître le Sauveur : un bébé emmailloté et couché dans une mangeoire ! L’ange vient ainsi souligner l’importance des gestes ordinaires posés par Marie et Joseph.
Dans cette annonce étonnante nous devinons-bien que Dieu n’arrête pas de nous surprendre : il se révèle souvent là où on ne l’attend pas.
La période des fêtes de Noël cristallise des aspirations très puissantes sur lesquelles les stratégies commerciales jouent avec talent pour nous pousser à toujours plus de consommation.
Nous pouvons légitimement avoir un regard très critique sur ce déferlement, mais, dans ces attentes, nous devons aussi savoir reconnaître des aspirations légitimes et communes à toute l’humanité. Croire que Dieu se confie à l’homme ne peut pas nous laisser indifférents devant tout ce qui s’exprime à Noël : le besoin de bien-être matériel, le besoin de communion, le besoin de paix, de fraternité, l’émerveillement devant les joies des enfants, la gratuité des cadeaux. On pourrait facilement faire correspondre ces attentes exprimées lors de fêtes de Noël à des attentes auxquelles Dieu vient répondre : les textes tirés des livres du Premier Testament lus au cours de l’Avent en témoignent largement.
À nous disciples du Christ de savoir entendre ces attentes et de savoir y déceler les appels de Dieu pour prendre notre part pour y répondre en étant : pauvres de cœurs, doux, artisans de paix, miséricordieux, en combattant pour la justice.
Pour terminer cette méditation, je voudrais vous proposer, tout à l’heure au moment de la communion, de présenter vos mains comme un berceau, ou une mangeoire, et de prendre un bref instant pour contempler que nous recevons dans nos mains : Dieu fait homme qui nous fait la surprise de se livrer totalement à nous et qui nous invite à prendre part à sa révélation !
Amen.
Et joyeux Noël !